Eléments de définition : méthodes et approches pédagogiques en EEDD

L’EEDD émane de la volonté de recréer les liens entre les individus et leur environnement (naturel, social, culturel…). Monter un projet en EEDD c’est à la fois vouloir faire ressentir, faire comprendre, faire connaître l’environnement à un public. Il ne s’agit pas exclusivement d’apporter des connaissances mais bien aussi de toucher la relation émotionnelle et affective entre les individus et leur environnement.

Photo GRAINE ARA

Cet article a été écrit avec Caroline Leininger-Frezal alors professeur relais pour l’Académie de Lyon au GRAINE Rhône-Alpes

Qu’est-ce que l’environnement ?

Etymologiquement, environnement signifie « ce qui est autour de soi ». De là découle un sens étroit du terme et un sens large.

Dans sa première acception, il désigne « l’environnement naturel : eaux, air, végétation, sols, relief »1. Il est alors synonyme de milieu biophysique dont l’homme ne fait pas partie.
Dans sa seconde acception, « non seulement il comporte des éléments naturels et des éléments matériels, mais aussi des personnes, leurs activités, leurs relations, leurs cultures, leurs institutions ; c’est tout ce qui nous entoure et agit sur nous »2. L’environnement comprend alors la nature mais ne s’y limite pas : il correspond à une prise en considération du milieu physique dans un contexte social, économique et culturel. L’homme est devenu une composante de l’environnement, il en fait partie. Cette évolution s’est affirmée dans l’approche systémique et reflète le processus de constitution de la science écologique dont ont résulté la sensibilisation et l’éducation à l’environnement.

Ce schéma est extrait du « Programme cadre en éducation à l’environnement, enseignement secondaire », coordonné par Léon Mathot, Ministère de l’éducation de la recherche et de la formation, Bruxelles, 1992.

EE ? EEDD ? EDD ?

En France on voit se côtoyer, dans les revues et les recherches, différents termes assez proches : Education à l’Environnement (EE), Education à l'Environnement vers un Développement Durable (EEDD), Education au Développement Durable (EDD). Qu’est-ce qui se cache derrière ces nuances ?

Dans le cadre de l’EE on ne considère pas seulement l’environnement comme les caractéristiques biophysiques du milieu qui nous entoure, mais on le considère en prenant en compte ses différentes dimensions : sociales, environnementales, économiques, culturelles (voir le schéma ci-dessus).


C’est pourquoi le glissement sémantique proposé aujourd’hui par une médiatisation croissante - celui de l’EE vers l’EEDD puis vers l’EDD - semble parfois déposséder le champ de l’EE de son histoire. En effet, si le terme de développement durable rassemble aujourd’hui tant d’esprits c’est parce qu’il se veut revêtir justement l’ensemble des caractéristiques d’une société : l’environnement, le social, l’économique et le culturel. Il recrée les liens distendus entre différentes sphères de la société qui ont trop longtemps œuvré séparément. Seulement l’EE avait déjà amorcé ce travail de mise en lien dimensions économiques, sociales, environnementales et culturelles dans une approche systémique de la société. C’est pourquoi on retrouve aujourd’hui dans le milieu de l’EE certaines réticences vis-à-vis du concept de Développement Durable et une volonté de parler d’Education à l'Environnement vers un Développement Durable plutôt que d’Education au Développement Durable. En effet, le terme d’EEDD permet de concilier les deux approches, dans une sorte de pléonasme certes, mais qui ne renie pas le passé actif des pionniers de l’éducation à l’environnement.


Cette première explication décrit certaines retenues vis-à-vis du concept de DD dans le champ de l’EE, mais on pourrait aussi retenir d’autres réflexions critiques sur ce concept. En effet le terme de développement est né dans une logique d’industrialisation et de croissance économique et revêt toujours une forme d’impérialisme occidental. Serge Latouche3 parle de « l’insoutenable défi du développement durable » qui ne correspond pas aux aspirations universelles profondes mais au désir de développement des plus riches. Ainsi, plutôt que de parler de développement durable « il faudrait commencer par voir le monde autrement pour concevoir des solutions innovantes »4.

Qu’est-ce que la pédagogie ?

Le terme « pédagogie » dérive du grec « enfant » et «conduire, mener, accompagner, élever ».
La pédagogie désigne désormais les méthodes et pratiques d'enseignement et d'éducation ainsi que toutes les qualités requises pour transmettre un savoir quelconque. Elle n’est plus spécifique aux enfants mais peut s’adresser à tous, à tous les âges de la vie.
Chaque pédagogie transporte avec elle des valeurs (solidarité ou individualisme par exemple) et renforce certains comportements (travailler en équipe ou tout seul) et certaines attitudes (trouver qu'apprendre c'est amusant ou ennuyeux)…

Le triangle éducatif5 est un modèle de plus en plus utilisé dans le milieu de l’EEDD.


Ce triangle s’articule autour de trois pôles indissociables : Savoir, Personne (les participants) et Contexte éco-socioculturel (milieu social, physique, environnant…). Le fait de mettre plutôt en avant la personne, le savoir ou le contexte relève d’un choix pédagogique.
Dans le cadre de l’EEDD on favorise la diversité des approches et méthodes pédagogiques, c’est ce qui en fait la richesse. En effet, chaque personne est différente, chaque contexte, chaque formateur a ses propres spécificités. C’est dans la démarche de projet pédagogique que l’on pose la question du sens et des valeurs de ses actions éducatives.

Qu’est-ce qu’éduquer ?

Eduquer est un terme polysémique. Du latin « educare », il désigne la formation intellectuelle, morale et physique d’un individu. L’éducation se compose d’un ensemble de savoirs, savoir-faire et savoir-être qui sont nécessaires à l’intégration sociale. L’éducation est donc un processus mais aussi un résultat.


Eduquer vient aussi de « ex-ducere » qui signifie « conduire hors de ». Eduquer c’est donc permettre à quelqu’un de se construire, de s’ouvrir au monde et d’accéder à sa propre pensée critique. Il ne s’agit pas seulement de voir l’enfant comme un réceptacle que l’on remplit de savoirs ou comme de l’argile qu’on modèle. L’éducation devient un processus par lequel une personne se développe harmonieusement personnellement et dans son environnement.

Dans le cadre de l’EEDD on favorise la diversité des approches et méthodes pédagogiques, c’est ce qui en fait la richesse

L’éducation à, pour, par, …

L’éducation « à », « pour », « au sujet de », « relative à », « par », « dans » l’environnement « vers », « pour » un développement durable : jeux de mots futiles ou querelles sémantiques ? Ces nuances langagières cachent d’importantes différences quant aux finalités attribuées à l’éducation et à l’EEDD.

Dans la perspective d’une éducation pour l’environnement, ce dernier constitue la finalité de l’éducation. L’objectif n’est donc pas le développement personnel. Il s’agit d’éduquer en vue de protéger l’environnement, souvent assimilé au milieu biophysique. L’éducation met l’individu au service de la protection de l’environnement (démarche écocentrique).

L’éducation au sujet de l’environnement a une portée très différente. Il s’agit de faire acquérir des compétences et des connaissances sur l’environnement. C’est une vision cognitive de l’éducation. L’éducation est ici synonyme d’instruction et de formation.

Dans la perspective de l’éducation dans l’environnement, ce dernier représente le milieu de la situation pédagogique. L’environnement constitue un support mais aussi une médiation. Il s’agit en effet d’apprendre de l’environnement, ce qui rejoint l’éducation par l’environnement, où celui-ci est utilisé comme moyen éducatif.

L’éducation relative à l’environnement (ERE) recouvre d’après Lucie Sauvé6, l’ensemble de ces trois champs. L’ERE peut être considérée comme un synonyme d’éducation à l’environnement, elle met en avant l’idée selon laquelle cette éducation s’inscrit dans la perspective de la mise en lien de la personne avec son environnement.


1. et 2. Les mots de la géographie. Brunet, Ferras, Thery, Doc. Française, 1992
3. Serge Latouche est professeur, économiste et philosophe, défenseur de la « décroissance ».
4. Le pari de la décroissance, contre le mythe du Développement Durable. Serge Latouche, Fayard, 2006.
5.  Guide pratique d’évaluation. Sous la direction de Dominique Cottereau, SCEREN CRDP Bretagne, 2004
6. Lucie Sauvé est professeure, titulaire de la chaire en recherche en ERE à l’université du Québec à Montréal.

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